HISTOIRE GÉOGRAPHIE SUR LE WEB

LA COLONISATION

Les empires coloniaux d'Afrique en 1914

Ce qui manque de plus en plus à notre grande industrie, ce sont les débouchés. Il n'y a rien de plus sérieux ; or, ce programme est intimement lié à la politique coloniale. Il faut chercher des débouchés.
il y a un second point que je dois aborder : c'est le côté humanitaire et civilisateur de la question. Les races supérieures ont le devoir de civiliser les races inférieures. Ce devoir a souvent été méconnu dans l'histoire des siècles passés. Mais de nos jours, je soutiens que les nations européennes s'acquittent avec grandeur et honnêteté de ce devoir supérieur.
Il faut aussi appeler un instant votre attention : à savoir qu'une marine comme la nôtre ne peut pas se passer sur la surface des mers, d'abris solides, de défenses, de centres de ravitaillements.
Rayonner sans agir, sans se mêler des affaires du monde, croyez le bien, c'est abdiquer, c'est descendre du premier rang au troisième puis au quatrième.
Est-ce que les gouvernements français laisseront d'autres que nous s'établir en Tunisie ? d'autres que nous faire la police à l'embouchure du fleuve rouge ?

Texte lu au parlement à la fin du XIXe siècle


Qui est l'auteur de ce texte ?

Quand a-t-il été rédigé ?


Selon l'auteur, il y a trois raisons pour la France de coloniser les continents africains et asiatiques :

- la première est économique : il s'agit de trouver des débouchés pour les produits français dont la quantité augmente à mesure des hausses de productivité. Principalement cependant, le but sera de trouver des matières premières dans ces pays.

- la seconde est idéologique : pour l'auteur, opinion largement partagée à cette époque, la mission de la France est aussi de "civiliser" les pays colonisés. C'est-à-dire de les évangéliser, de les éduquer, de leur apporter notre science et notre médecine (par des campagnes de vaccination)...

- la dernière raison est stratégique et militaire : l'auteur pense que la France se doit -comme grande puissance- d'être présente dans le monde et d'avoir des postes d'observation et d'intervention militaire.

Village Moï dans la forêt indochinoise. Image extraite d'un manuel français du primaire datant des années 50. Le commentaire de cette image est mis en parallèle avec une vue du centre de Paris :
"Quelle différence entre cette vue qui représente un village primitif et celle de Paris ! Remarquez les habitants, leur costume, les maisons, le pont. Comme tout cela ressemble peu à ce que nous voyons dans une ville moderne. Des français vivent là-bas et font connaître aux habitants les bienfaits de notre civilisation".


Le racisme sous-jacent à ce texte est répandu au siècle dernier. Il s'habille d'une légitimité pseudo scientifique. La classification en races est entreprise par l'historien Augustin Thierry ou le saint simonien Victor Courtet de l'Isle. Arthur de Gobineau publie en 1853 ou 1855 un Essai sur l'inégalité des races. De Gobineau propose de distinguer trois races : les Noirs, les Blancs et les Jaunes. Sa pensée est néanmoins plus complexe que le titre le laisse penser. Il n'y pas chez Gobineau de race supérieure puisqu'il reconnaît à la race Noire l'apport du sens artistique. Gobineau rejette néanmoins la démocratie en cela qu'elle mélange les races, cause du déclin de la race Blanche. D'autres penseurs du racisme sont des héritiers du darwinisme ; ils développent par exemple le mythe de la supériorité de la race germanique et l'antisémitisme. Ernest Renan fut le représentant en France de ce courant. Renan légitime par la supériorité de la race blanche sur la race noire la colonisation : "le nègre est fait pour servir aux grandes choses voulues et conçues par le blanc...". Le monde politique intègre ce discours avec Jules Ferry par exemple. Le clivage gauche-droite ne fonctionne pas à ce moment. Il faudra attendre l'affaire Dreyfus pour qu'il se révèle. Néanmoins, "quand on est un raciste scientiste comme Vacher de Lapouge, on suppose qu'il existe une corrélation, voire une relation causale, entre la dolichocéphalie (mesure du crâne), la haute taille, les chevaux blonds, les yeux bleus et les aptitudes intellectuelles. Quand on est un "antiraciste" du XIXe siècle, tel l'anthropologue Manouvrier ou le sociologue Bouglé, on n'accepte pas cette relation causale". L'inégalité entre races noires et blanches n'est remise en cause par personne. Au début de notre siècle en revanche, le nombre d'antiracistes égale celui des racistes.

Texte élaboré d'après un sujet de l'Histoire et de La Recherche (octobre 1997).


Et aujourd'hui

Le généticien André Langaney explique que la notion de race n'est pas fondée scientifiquement, elle est une construction historique. "La notion de race n'a pas de signification biologique, et les différences que d'aucuns perçoivent comme essentielles (couleur de la peau, forme des cheveux...) sont négligeables en regard des différences biologiques entre les individus".

Il est en effet impossible de classer les hommes selon des catégories simples : "la taille varie de plus de cinquante centimètres entre les plus petits et les plus grands d'une population. Même chose pour les couleurs de peau, (...) la diversité est beaucoup plus grande dans les populations à peau foncée que dans les populations à peau claire. (...) il y a des individus très grands et des très petits parmi les plus foncés, les Tutsis et les pygmées par exemple, et des très grands et des très petits parmi les plus clairs, comme les Suédois et les Lapons". La notion de race est en revanche pertinente chez l'animal car depuis très longtemps, l'homme a procédé à des sélections.
Il n'existe aucun gène des Jaunes, des Noirs, des Blancs. Au contraire, dans tous les systèmes génétiques humains connus, les répertoires de gènes sont les mêmes. Nous descendons en effet d'une seule et unique petite population de la préhistoire, 30 à 50 000 personnes environ.
Les différenciations physiques se sont ensuite opérées très vite en fonction des conditions climatiques (l'ensoleillement) ou de la nutrition (les Japonais grandissent beaucoup ces derniers temps).


Carte parue dans Maurice Fallex, Atlas de Géographie Économique, Delagrave.

"l'œuvre coloniale, l'exemple français dans les années 20"
(D'après Histoire de la France coloniale, A.Colin)

La France ne s'est pas limitée à une œuvre économique dans les colonies. L'administration consent par exemple à des crédits pour faire face à des calamités en Algérie en 1920 même s'il ne faut pas surestimer les efforts dans les domaines de l'assistance réduits à moins de 1 % du budget consacré à l'Algérie. Les délégations financières inscrivent au budget de 1930 un crédit de 5 millions pour la réalisation de villages indigènes en dur.
En Algérie, le nombre des
médecins et des cliniques reste sans comparaison avec les besoins. "Seules les séances de vaccination collective et de quininisation préventive, multipliées, les visites d'infirmières visiteuses, instaurées par le gouvernement de Viollette en 1926, et la création d'équipes sanitaires mobiles en 1929 représentent un progrès". Le travail de Lyautey au Maroc est plus efficace. Les maladies tropicales en Afrique noire font des ravages malgré le travail de l'AMI (Assistance Médicale Indigène). Le docteur Jamot parvint au Cameroun en 1921 à faire reculer la maladie du sommeil. Au Vietnam, l'importance de la présence française améliore à la marge le sort sanitaire de la population indigène qui profite de la présence de nombreux médecins.
L'enseignement est prodigué aux indigènes dans des écoles spéciales. Le taux de scolarisation demeure très largement en dessous de 10 %. Au Maroc et en Tunisie, les structures existantes supportées par les musulmans sont maintenues. En Afrique noire, l'enseignement est orienté vers des débouchés agricoles. Le nombre d'enfants scolarisé est très faible, en particulier dans le secondaire.


Le travail forcé

Un chef de province de Madagascar : "Si l'administration supérieure et les chefs de province et district n'avaient employé que la persuasion depuis 25 ans à Madagascar, les routes d'intérêt général, les travaux importants comme les chemins de fer, n'auraient jamais pu être construits, les principales exploitations européennes n'auraient pu être crées. Il ne faut pas perdre de vue que l'indigène est un grand enfant en général, qu'il est paresseux, indolent (...)"

Réponse de l'inspecteur des colonies : "Je ne partage pas l'opinion du chef actuel de la province d'Ambositra. Théoriquement, l'idée de recourir à la contrainte pour le recrutement de la main d'œuvre indigène et son maintien dans les chantiers peut se concevoir, mais en pratique ce système est à Madagascar synonyme d'abus et de servage de l'indigène."

Le ministère : "Il est certain cependant qu'il y a pour tous les individus une obligation morale de travail. C'est là un des premiers principes généraux qui pourrait être dégagé. Ceci ne veut pas dire qu'il faille rendre législativement le travail obligatoire, le travail forcé". Mais il faut tendre à amener, par la persuasion et lui créant des besoins nouveaux, l'indigène à donner l'effort que tout être humain doit fournir."


François Mitterrand, morceaux choisis en 1953

"Une jeunesse intelligente et curieuse s'enchante aux leçons de notre culture"

"C'est pourquoi, si l'on considère ce bloc colossal qui, de Lille à Brazzaville et d'Abéché à Dakar, s'étale sur sept mille kilomètres de longueur et trois mille de largeur et si l'on constate qu'il n'est entaillé que par le bassin occidental de la Méditerranée, on s'étonne que tout n'ait pas été tenté pour garantir son intégrité".