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Illustration du Petit Journal de mars 1906. Nous dénotons dans cette manifestation la présence des drapeaux rouges (c'est la Commune qui a donné à ce symbole ses lettres de noblesse), de femmes et d'enfants, les corons sur la droite. 1906 est en effet une grande année de grèves : le 1er mai, il y a près d'un gréviste pour 16 ouvriers. |
L'apogée du mouvement ouvrier en France est à dater de la fin du siècle (à partir de 1880) jusqu'à la première guerre mondiale. Toutes les catégories d'ouvriers vont s'engager un jour dans la grève. Entre 1895 et 1899, 35 % des grévistes appartiennent à la grande industrie (textile, métallurgie, mines). La durée moyenne des grèves s'allonge (7 jours en 1875 à 21 jours en 1902). Les grèves sont alimentées par les inquiétudes des ouvriers devant les concentrations qui bouleversent les modes de vie. Les grèves sont encore influencées par les mentalités rurales : le 1er mai 1880, les mineurs d'Anzin profitent du carnaval pour se déguiser et armés de bâtons, parcourir les rues pour empêcher le travail. Les commerçants et les paysans se montrent en général solidaires des actions entreprises. Les ouvriers des grandes industries sont également désenchantés par le paternalisme tandis que le cléricalisme est dénigré (les enterrements civils qui se propagent le montrent). Les ouvriers travaillent de moins en moins pour le patron et de plus en plus pour de l'argent comme en témoignent par exemple les sidérurgistes du Creusot qui exigent le paiement du travail d'entretien le dimanche alors que c'est un vieille tradition. Plus étonnant, à Carmaux, en 1883, les grévistes s'inquiètent du blocage de l'avancement et du refus de la direction de garantir l'embauche des enfants à la mine. La retraite devient également une revendication prioritaire. "Les problèmes de salaires sont relégués au second plan ; au contraire, le refus du travail aux pièces, des nouveaux règlements ou des nouvelles machines, l'opposition aux contremaîtres jugés trop autoritaires, la volonté de faire respecter un "tarif" négocié auparavant par le patron, sont les motifs les plus fréquemment avancés". La volonté de contrôle ouvrier sur les caisses de secours par exemple s'exprime également. Les verreries lyonnaises voient s'établir un conseil élu par les travailleurs qui permet aux ouvriers d'exercer un contrôle sur les embauches.
D'après Gérard Noiriel, Les ouvriers dans la société française, Seuil.
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